Mutter
Ce travail ne s’apparente pas à proprement parler à une ” série “, puisqu’il s’est construit tout au long de ma vie et qu’il n’est pas achevé. Il se décline ici à travers des peintures à l’acrylique, des dessins, des collages, des photomontages et des lithographies et au mélange de ces différentes techniques. Durant cinq ans, j’ai rédigé un essai philosophique intitulé ” Discours à la mère “. Ce livre qui a pour ambition de reconsidérer le rapport psychologique entre l’enfant et la mère, constitue un étayage idéologique qui accompagne l’oeuvre artistique. En voici un extrait :
… L’amour encensé par Aristophane ne se distingue pas de l’amour de soi ; la quête de l’autre partie manquante qu’il célèbre est la quête de son propre double. Ainsi l’identification de la mère à son enfant dans le processus fusionnel, ne favorise ni la reconnaissance, ni l’acceptation réelle de l’enfant ; la mère s’aime elle-même en son enfant dès lors qu’il disparait en tant qu’être réel et ne se sépare pas de son corps. L’amour fusionnel est le prototype de l’amour narcissique et autoérotique ; celui où l’être devient dans l’hallucination d’une plénitude, sa propre finalité. Le paradoxe réside en ce fait que cette autosuffisance ne peut être véhiculée que par l’apport d’un autre , mais un autre sacrifié : le phallus c’est l’enfant nié .
Si quelque chose se transmet du psychisme de la mère à celui de l’enfant in utero, il faut alors considérer que la vie mentale de la mère s’organise d’emblée en dehors de la réalité biologique de l’être qu’elle abrite ; sous cet angle, son désir n’est pas tant celui de voir naître l’enfant que de garder en elle le phallus. Si le désir de l’enfant est appelé à coïncider avec celui de la mère, sa première volonté sera celle de ne pas naître.